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Cannes 2021 Jour J+7 : des nouvelles du palais

par Eric Van Cutsem
Publié: Dernière mise à jour le

7h00 du matin. Cannes est un festival qui aime les surprises. La billetterie, passée de dysfonctionnelle à fonctionnelle, est aujourd’hui en rade à nouveau. Et pas de chance, c’est pour les réservations du 16, jour de la présentation en section Cannes Première de VORTEX, le nouveau film de Gaspar Noé. Après plusieurs tentatives, j’arrive cependant à le réserver et reçoit on ticket via mail. Plutôt cool (enfin c’est ce que je croyais)!

Après cette perte de temps, il me reste à peine de quoi descendre en quatrième vitesse sur Cannes pour rattraper la séance de 8h30 au GTL de PETROV’S FLU (La fièvre de Petrov), film d’actualité en ces temps de SARS-Cov-2 [NDA: je plaisante, le film n’a rien à voir, si ce n’est que le personnage a la grippe dans le film].

Petit problème, ma demande de réservation de la place pour ce film n’a toujours pas été validée au niveau billetterie. Donc pas de ticket. En arrivant dans la file pour entrer, je le signale à un des membres du staff qui non seulement compatit, mais en plus de ça sort de sa poche, comme un magicien, un ticket pour la séance. Qu’il en soit remercié!

Aux dires de certains de mes collègues journalistes, PETROV’S FLU n’est pas des plus simples à comprendre. C’est Kirill Serebrennikov, le réalisateur de l’excellent LETO en compétition en 2018, qui propose ici le trip imaginatif d’un auteur de BD dans la Russie post-soviétique dans un film de 2h25!

Le scénario est déroutant, entre imaginaire et réalisme, la mise en scène super dynamique et flamboyante (les transitions entre réalité et imaginaire sont incroyables), mais il est vrai qu’en tant que spectateur ce n’est pas facile de se projeter dans la tête de Petrov, le héros de l’histoire.

Petrov’s Flu – Yuri Kolokolnikov

Après ce film un peu déroutant mais jamais lassant, je fais un tour par la billetterie pour signaler mon problème de requête non validée pour le film. Ensemble, nous parvenons à annuler cette demande pour que je ne sois pas pénalisé de ne pas avoir utilisé éventuellement un ticket que j’aurais pu avoir (pour information, au premier ticket non utilisé, on reçoit un mail d’avertissement, au 2e, on peut perdre son accès à la billetterie en ligne).

Mon prochain film étant à 16h00. Je décide de retourner écrire dans ma location. Un petit peu de sport ne fait de mal à personne.

Ecriture, repas, écriture et descente en vélo vers 15h20 pour voir le Asghar Farhadi, UN HÉROS, en salle Bazin avec mon ticket, mon pass sanitaire et mon badge.

Asghar Farhadi est un cinéaste iranien à qui l’on doit le magnifique UNE SEPARATION (qui a gagné l’Oscar du meilleur film étranger en 2012) ou encore LE PASSÉ avec Bérénice Bejo, un cinéaste du quotidien, un très bon scénariste dont les personnages sont souvent complexes.

UN HEROS

Avec UN HÉROS, il nous raconte l’histoire de Rahim, un homme qui se trouve en prison en Iran parce qu’il n’a pas pu remboursé une dette. Rahim est un homme plutôt naïf, toujours prêt à dire oui pour éviter les problèmes et les conflits. Lors d’une permission, il va devenir un héros malgré lui ce qui va lui causer de nombreux problèmes.

Farhadi réussit avec beaucoup de subtilité à nous montrer comment un acte à priori anodin monté en épingle pour en faire un acte héroïque peut devenir un fardeau pour une personne comme Rahim. Cette descente aux enfers, cette impasse dans laquelle va tomber Rahim est au centre du récit du film.

Mise en scène solide sans fioritures, casting impeccable, constat politique et sociale, UN HÉROS pourrait bien faire l’unanimité pour un prix cette année à Cannes.

Il est 18h15, et il est aussi temps d’aller voir le nouveau Desplechin, TROMPERIE, en salle Debussy. Arnaud Desplechin est un habitué de Cannes (ROUBAIX UNE LUMIERE, LES FANTOMES D’ISMAËL), il n’est donc pas surprenant de le voir cette année dans la section Cannes Première, section qui voit s’afficher des films qui ne trouvent pas leur place dans d’autres sections.

Denis Podalydès et Léa Seydoux dans TROMPERIE

Son adaptation d’un roman de Philip Roth suivant les amours diverses et variées d’un auteur de roman américain nommé Philip est plutôt divertissantes et relève complètement du numéro d’acteurs avec un Podalydès en très grande forme. On y retrouve aussi Léa Seydoux (décidément incontournable pour ce 74e Cannes), Anouk Grinberg, Emmanuelle Devos.

Très intellectuel dans les dialogues, très pièce de théâtre dans sa mise en scène, TROMPERIE est loin d’être désagréable mais aussi loin d’être mémorable, très semblable à une bulle de champagne en définitive.

La soirée n’est pas finie mais le petit battement entre deux films me permet de discuter avec quelques collègues, de se changer les idées pendant quelques dizaines de minutes avant de se rendre en salle du Soixantième pour changer complètement de genre avec BAC NORD (BAC étant l’acronyme de Brigade Anti-Crime) de Cédric Jimenez.

Ici, on ne parle plus de subtilité, on parle de flics qui surfent sur la ligne entre délinquance et justice pour faire coffrer des truands. Fiction basée sur des faits réels, le film parle d’une brigade de la police de Marseille qui, en voulant coffrer des truands, va trop loin et se retrouvent sur le banc de l’accusation avant même d’avoir compris pourquoi ils y étaient.

BAC NORD

Hors compétition, le film d’action avec Gilles Lellouche dans le rôle principale sent le soufre à plein nez car un peu trop à la gloire de ces flics, sans avoir réellement de point de vue sur les méthodes employées. On ressort de là en se disant qu’il vaut mieux prendre le film pour ce qu’il est, un action movie, et bien vite oublier le côté politique de la chose et la description très brutale et apocalyptique des banlieues de Marseille.

Petite remarque amusante, Adèle Exarchopoulos (qui joue dans BAC NORD) a 2 films à Cannes cette année et Léa Seydoux en a 4. Les deux comédiennes de LA VIE D’ADELE sont en tout cas toujours très actives au cinéma!

Il est prêt de minuit lorsque je retrouve mon vélo et la douceur du soir pour faire les 10 kms qui séparent le Palais de mon lit.

Demain, le soleil se lèvera à Cannes.

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