Lundi 20 mai. Nuit plus calme, journée longue en perspective avec une conférence de presse et 4 films. Le lever se fait à 8h14 avec l’impression d’avoir dormi 24h d’affilée. C’est magique.
Après un petit déjeuner (hé oui quand on se lève plus tard, on peut se payer ce luxe) avant d’aller vers 10h15 pour assister à la conférence de presse du film de Céline Sciamma, PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU.

Grand plaisir de voir uniquement des femmes lors d’une conférence de presse. Cela change un peu de ce qu’on a l’habitude de voir. Céline Sciamma se prête avec plaisir au jeu des questions/réponses. Elle met en avant sa volonté d’avoir fait un film d’amour qui parle non seulement de la rencontre amoureuse mais aussi de la relation intellectuelle qui y est associée. Elle a voulu aborder aussi l’amplitude de l’amour (ce qui peut se passer avant, pendant et après un grand amour).
Ses comédiennes sont dithyrambiques envers Céline Sciamma, vantant ses qualités de bienveillance, d’écoute et de douceur. Quant à Adèle Haenel, elle apprécie cette deuxième collaboration avec la réalisatrice soulignant le fait qu’elle lui laisse une certaine latitude pour collaborer à la mise en scène. Elle amuse aussi l’assemblée en expliquant les trois phases (selon elle) de son personnage au cours du récit: la phase japonaise, la phase dégel et la phase chaude.

Pour Céline Sciamma, c’est son film le plus dialogué mais aussi celui où elle a le plus fait de champs-contre-champs qui ne sont clairement pas sa tasse de thé. Mais il fallait bien ça pour traduire les différents regards qui s’interpénètrent durant le film.
Il est près de midi lorsque je sors, ce qui me laisse du temps pour l’écriture avant d’aller voir ADAM de Maryam Touzani (et manger? oui, accessoirement).
ADAM est l’histoire de la rencontre à Casablanca entre Samia, une jeune femme célibataire enceinte et sans domicile fixe, avec Abla, une mère célibataire qui joint les deux bouts en tenant une petite boulangerie dans sa maison. Film réalisé par une femme avec deux excellentes interprètes féminines, parlant de problématique féminine au Maroc, ADAM est donc à rapprocher -même si le thème est fondamentalement différent- de PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU. Les sujets explorés par le film sont toujours brûlants d’actualité et l’émotion surgit à chaque plan du film.
Une très bonne surprise donc dans la section Un Certain Regard! Petite halte écriture sur la terrasse avant d’entamer le film suivant. Il fait beau, plus pour longtemps annonce-t-on et j’en profite pour chauffer mes vieux os au soleil.

Le film suivant relève plutôt pour certains de mes confrères belges et autres du masochisme puisqu’il s’agit du nouveau Lelouch, la suite de UN HOMME ET UNE FEMME, 50 ans plus tard: LES PLUS BELLES ANNEES D’UNE VIE. Le tout avec Jean-Louis Trintignant et Anouk Aimée reprenant leur rôle de l’époque mais avec leur âge actuel bien sûr (vous suivez toujours?). Sorte de patchwork entre d’anciennes images du film et des dialogues entre Jean-Louis Duroc et Anne Gauthier, le film n’est pas si désagréable que cela à regarder. Et une certaine nostalgie fonctionne bien pour une tranche d’âge bien déterminée. Car en fait, dans la salle du Soixantième, je pense que la moyenne d’âge pour cette séance devait être de 60 ans!
Sans changer de salle, j’enchaîne donc rapidement avec le film de Gael Garcia Bernal, CHICUAROTES.

Après une entrée en fanfare de Gael Garcia Bernal et de son équipe parraîné par Alejandro Inarritu (très applaudi!), le film peut commencer. CHICUAROTES nous entraîne à Mexico sur les pas de jeunes ados débrouillards mais aussi losers absolus qui multiplient les embrouilles et les ratages. Si la mise en scène est très dynamique et le jeu des interprètes excellents, on a quelques difficultés à s’attendrir pour ces jeunes qui ne font pas naître d’empathie. Ce problème de caractérisation gêne fortement surtout dans la dernière partie du film.
Sorti de la salle du Soixantième vers 21h30, je suis en route pour aller vers le Debussy voir FRANKIE de Ira Sachs. Un peu encore en dehors de la réalité (après 3 ou 4 films en suivant, la limite entre réalité et fiction devient nettement plus floue -il faudrait faire une thèse là-dessus) et surtout la tête penchée sur mon smartphone, je ne me rends pas compte de l’agitation autour de moi et je manque de percuter de front les 1,75 mètres plus les talons de Elle Fanning qui se rend accompagné de photographes, de curieux et de gardes de sécurité à l’Agoria dans l’enceinte du Palais. Abasourdi, je trouve quand même le temps de faire quelques photos volées de cette rose apparition.

Encore un peu impressionné, je me rends dans la file au Debussy pour le film de 22h30. FRANKIE de Ira Sachs c’est l’histoire d’une actrice célèbre (interprétée par Isabelle Huppert) qui réunit toute sa famille recomposée à Sintra au Portugal pour les avoir auprès d’elle avant de mourir (elle a une récidive de cancer). Ira Sachs, c’est LITTLE MEN, LOVE IS STRANGE, des films plutôt sensibles et réussis. Ici, pour le coup, c’est un film froid, qui s’essaye au genre « chorale » sans parvenir à dynamiser le tout.
On sort de là vers 1h du matin sous une fine bruine forts déçus en se disant que l’on vient de voir un des films les plus moyens de la compétition.
Demain le soleil jouera à cache-cache avec les nuages à Cannes comme il le fait depuis le début de cette quinzaine maussade (au niveau météorologique)…