A l’occasion de la sortie de Traque à Boston, nous avons rencontré l’acteur Themo Melikidze qui incarne un des deux terroristes du film.
Son nom ne vous dit probablement pas grand chose. Pourtant, il faudra le retenir. Il tient un des rôles principaux de Traque à Boston, le dernier film de Peter Berg traitant des attentats du marathon de Boston. Themo Melikidze y interprète l’un des deux terroristes. Né à Tbilisi, capitale de la Géorgie, Melikidze a grandi à Bruges en Belgique avant de partir étudier à New York. Nous l’avons rencontré pour vous.
Pour commencer, peux-tu parler de ton background ?
Quitter la Géorgie pour venir ici a été une grande étape. En Géorgie, on voit un autre aspect de la vie et de la pauvreté. Ici on n’avait pas à se préoccuper de ne pas avoir d’électricité, d’eau, de nourriture, de chauffage. Venir ici m’a fait découvrir une autre facette de la vie. Une vie plus relax, aller à l’école. Ca a été une étape très importante pour ma famille. J’y ai vu beaucoup de possibilités. En tant que jeunes, beaucoup de choses s’offraient à nous. Enfant, j’ai toujours eu une envie de jouer, de faire quelque chose où je me mettais un peu en avant. L’envie d’amuser a toujours été présente. Je me souviens avoir regardé un film de Bruce Lee qui m’a beaucoup inspiré. C’est comme ça que j’ai commencé les arts martiaux. De là j’ai commencé à prendre des cours de théâtre. Cette envie n’a jamais disparu, elle était toujours présente et n’a fait que croître en grandissant. En rhéto (l’équivalant de la terminale en France NDLR), je me suis décidé à aller étudier à New York pour devenir acteur. J’ai postulé à la New York Film Academy mais ça coutait 30 000$ l’année donc mes parents ne voulaient pas. J’ai passé une audition et ai obtenu une bourse. Sans ça cela aurait été impossible. Aller là-bas a vraiment été le début de ma carrière.
Après mon diplôme, j’ai eu des contrats à Broadway. A un moment, mon visa a expiré donc j’ai du rentrer en Belgique. Je n’avais pas de boulot, rien en cours donc ce fut très dur. Il y a un an et demi, je me suis décidé à aller à Los Angeles. Alors que je croyais que la partie la plus difficile de ma vie était derrière mot, arriver là fut pire. Les premiers quatre mois furent les plus difficiles mais nécessaires pour me tester, voir à quel point je voulais tout ça. Je n’avais pas d’appart, pas de voiture, je faisais du vélo pour aller d’audition à audition, à des jobs non payés, des films d’étudiants,… N’importe quoi. Je m’en foutais. Je voulais réaliser mon rêve et ne pas revenir tant que je ne l’aurais pas réalisé.
Un jour, j’ai reçu un e-mail d’un coordinateur de talent m’indiquant qu’une agence voulait me rencontrer. Je n’y ai pas trop prêté attention au début car, tu ne reçois jamais d’e-mails d’agences qui veulent te rencontrer. L’agence était officielle donc je m’y suis intéressé. Ils me voulaient pour des publicités. Comme ils aimaient mon background et le reste, ils m’ont fait passer une audition test qui servirait pour des longs-métrages. Je l’ai fait et ont tellement aimé qu’ils m’ont également représenté pour des longs-métrages. Une semaine plus tard, alors qu’on venait de commencer à travailler ensemble, ils m’ont envoyé un e-mail pour Traque à Boston. Peter Berg, Mark Wahlberg, un film sur les attentats du marathon de Boston, ils cherchent le rôle de Tamerlan Tsarnaev. « Quoi ? Ca ne peut pas être Mark Wahlberg, la star de ciné. » Mais non, c’était bien lui. C’est comme ça que tout a commencé. J’ai passé un essai qu’on a envoyé au directeur de casting, ils l’ont vue puis j’ai été à une audition en vrai. Ca s’est bien passé puis j’ai rencontré Mark Wahlberg et Peter Berg. Il y avait du monde. J’ai fait l’audition. Une semaine plus tard, j’attendais l’appel de mon agent. « Ils t’ont adoré, ils te veulent. » Plus tard, Peter et Mark m’ont avoué que, dès le moment où je suis rentré dans la pièce, ils me voulaient.
Comment as-tu travaillé avec eux ? Peter Berg comme réalisateur et Mark Wahlberg comme producteur vu que tu n’as pas vraiment de scène avec lui dans le film.
On était toujours ensemble sur le plateau bien qu’on n’ait pas de scènes ensemble dans le film. Etre avec lui et le voir travailler vous fait comprendre pourquoi il a tant de succès. Il travaille énormément. Peter Berg aussi. Il était le premier sur le plateau et le dernier à partir. Voir ces célébrités, c’est quelque chose, on voit le résultat. Mais on ne voit pas tout le travail qu’ils font, tout ce qu’ils mettent pour arriver à ce niveau là. Ils ont tous été adorables avec moi. Comme n’importe qui. Pour moi, en tant qu’ « espoir », c’est hyper important de voir ça, de rester humble, de s’entraider, c’est ce que j’ai appris de Traque à Boston. C’était absolument incroyable. J’ai aussi pu travailler avec J.K. Simmons. En 2014, j’étais à la maison en Belgique et je regardais les Oscars. J’ai dit à mon pote qu’un jour je serais sur un plateau de tournage avec lui. En tant que figurant ou autre, peu m’importait. Je lui ai dit que je serais sur un plateau avec lui et que je lui dirais à quel point il est incroyable. Même pas un an plus tard, je suis sur un plateau avec lui et je lui raconte ce que je viens de dire. Il m’a répondu « Et bien, tu l’as fait ». Ca n’a pas de prix.
J’ai vu plusieurs junkets que tu as donné à la presse américaine donc je sais que tu penses que ce n’est jamais trop tôt pour parler d’un sujet aussi grave mais …
Tu as absolument raison. Quand j’ai pris connaissance de tout ça, je me suis dit « Déjà ? Cela vient tout juste de se produire. » Mais, quand j’étais sur le plateau à Boston, j’ai rencontré les habitants. Ce film n’a été possible que parce que les habitants de Boston le désiraient. Quand j’étais là-bas, j’ai rencontré plusieurs personnes impliquées dans les événements : policiers, pompiers, infirmières, médecins,… Ils nous ont tous aidés, ont donnés des conseils. Le film est pour eux. Le film n’est pas à propos de la tragédie et certainement pas à propos des deux poseurs de bombe. C’est à propos des victimes, de ceux qui ont été blessés.
Et qui se sont rassemblés.
Exactement. C’est ce qui est hyper important. C’est partout aux nouvelles ce genre d’histoire. Tous les jours. Au Moyen-Orient, Islamabad, en Turquie, à Paris, à Bruxelles,… C’est vraiment partout. Le message est nécessaire aujourd’hui. C’est pour ça que c’est important. Pas parce qu’on a fait un film sur une attaque terroriste à Boston. C’est le message qu’on partage, qu’en tant qu’être humains, on peut se rassembler, s’entraider et travailler ensemble pour de grandes causes.
Comment t’es-tu préparé pour créer le personnage et qu’elles recherches as-tu effectué ?
C’était quasiment impossible de se préparer pour un pour un personnage comme ça. Ce gars avait une femme, un enfant, un frère, des amis à son club de boxe, il avait il super bonne relation avec son coach,… Le fait que, le soir, il rentre avec une pensée telle que « demain je vais poser une bombe au marathon de Boston », c’est dingue. En tant qu’acteur, je me dévoue à 100% à mon rôle, peu importe à quel point cette personne était mauvaise. Le type de personnage m’importe peu mais il faut que ça soit fait à fond. J’ai lu tout ce que j’ai pu à son sujet. J’ai lu sa page Wikipédia 1000 fois, j’ai vu ses clips vidéos sur Youtube. Ensuite, j’ai rencontré son coach de boxe avec qui il s’est entraîné pendant cinq ans. Il m’a donné beaucoup d’informations, de détails personnels. Je lui ai demandé de me traiter comme il le traitait lui. Les mêmes exercices de préparation, la même façon de parler,… Tout pareil. On a fait ça pendant quelques semaines et c’était super mais, il y avait une drôle de sensation. Je portais ses gants, son short, sa corde à sauter,… C’était vraiment bizarre. Un jour, alors qu’on s’entraînait à faire des enchainements, le coach s’est mis à crier « Stop, stop, stop. C’est vraiment bizarre mec. » C’était un grand moment pour moi parce qu’ils se sont connus pendant cinq ans et je me suis mis dans sa peau en quelque sorte. A certains moments, ce n’était pas agréable de se préparer pour jouer ce personnage mais, pour être honnête, ce qui m’a vraiment motivé et m’a permis d’aller jusqu’au bout, c’est la haine et colère absolues que j’avais pour lui. Au lieu de les ignorer, je les ai utilisées et, au final, ça a payé.
Oui vraiment. Il fait tout de sang froid ce qui est terrifiant.
Merci beaucoup. Ce qui est vraiment terrifiant c’est que c’est très réaliste. Quand on regarde les deux frères, on ne voit pas deux méchants. On voit deux jeunes qui travaillent ensemble. Quand ils carjackent Dany, un des deux demande s’il y a une prise pour un iphone. Cela semble irréel mais ça s’est vraiment déroulé. C’est vraiment effrayant. C’est un des éléments que Peter Berg maîtrise vraiment. Donner cette impression de réel si grande. C’est un honneur pour moi d’avoir pris part à ce projet, surtout en tant que premier film.
Dans les nombreux junkets que tu as fait, tu parles beaucoup de ta façon de travailler avec Jimmy O. Yang (qui joue Dany, la personne carjackée par les deux frères), ce qui est normal vu que tu faisais les interviews avec lui. Tu y racontes que vous ne vous étiez pas rencontrés avant, que vous n’avez quasiment pas parlé et que vous ne vous regardiez pas pendant le tournage.
Haha, c’est vrai que j’en ai beaucoup parlé.
Mais qu’en est-il de ton travail avec Alex Wolff (qui joue Dzhokhar Tsarnaev, le frère de Tamerlan) ?
Ah, merci de demander ça. On était comme des frères dès le début. Quand on s’est rencontrés, on a rigolé parce qu’on ressemble chacun aux frères Tsarnaev. On a parlé de rap, des frères, des scènes. Ca a été immédiat. L’amitié était là, la fraternité aussi. On était à l’aise ensemble. Pendant le film, on s’est tellement lié d’amitié qu’après le tournage, je suis allé vivre chez lui à Los Angeles. Quand je vais à Los Angeles, je reste chez lui. On est devenu de vrais frères. Travailler avec lui était génial. On n’a pas besoin de parler pour communiquer. On sait ce qu’il en est. Ce n’est pas quelque chose que l’on apprend où qui se pratique comme ça. Ca doit être là naturellement. Il est super talentueux et est absolument génial. Travailler avec quelqu’un comme ça, c’est génial. C’était l’alchimie pure. Jamais on n’a forcé la fraternité. Peter Berg nous a donné beaucoup de confiance et de la liberté donc c’était un pur plaisir.
Comme je le disais, tu as expliqué dans les junkets ta façon de bosser avec Jimmy. Au final ça fonctionne bien donc ce n’est pas plus mal mais, n’étais-tu pas un peu anxieux à l’idée de ne pas le rencontrer sachant qu’une scène si importante allait arriver ?
Oui je l’étais mais je pense que c’était bien comme ça parce que c’est comme ça que le personnage se sentait aussi. Je pense que c’était important pour nous de ne pas se rencontrer car, la scène qui est dans le film, c’est la première fois que je voyais Jimmy. Ca a payé pour nous. On savait ce qui se passait pour les personnages. Même entre les prises on ne parlait pas. Ca nous a beaucoup aidé. Maintenant, on est amis évidemment. Il m’a proposé un bowling hier mais il ne savait pas que je n’étais pas à Los Angeles. C’est incroyable de voir ce qui est sorti de ce processus. Mais c’est sûr qu’il y avait de l’anxiété. Je ne savais pas exactement comment il allait réagir. Quand j’attrape son bras, c’était la première fois que je l’attrape, je ne savais pas comment il allait réagir. Il tire, je le retiens. Ca a participé à ce souci d’authenticité cher à Peter.
Ca fonctionne plutôt bien pour toi maintenant. Tu es actuellement dans la série 24 Legacy (spin off de 24h Chrono).
Ca a démarré sur la Fox, ça passe tous les lundis. 24h Chrono est une série si emblématique. Avoir ça après Traque à Boston, sur la Fox, après le Superbowl, c’est incroyable. Ce n’est pas aussi profond que Traque à Boston mais, c’est intense et tellement génial à faire. J’ai grandi avec 24h Chrono donc, être dans la série, c’est génial. Cela se passe vraiment bien pour moi. Cela fait plusieurs mois qu’on a terminé le tournage à Atlanta.
Est-ce que Kiefer Sutherland est impliqué ?
Oui, comme producteur exécutif. Il fera peut-être un caméo mais il n’a pas de rôle.
Comment vois-tu la suite ? As-tu déjà reçu plusieurs propositions ?
J’ai reçu plusieurs offres. Je pense que ce film m’offre plein de nouvelles choses donc j’en profite à fond. Parce que rien n’est aussi doux que la première fois. Il n’y aura pas de seconde première fois donc j’en profite vraiment à fond. Je me concentre sur mon prochain projet maintenant. Mon agent et mon manager me soutiennent à fond et travaillent à fond pour moi. Peut-être que la prochaine fois qu’on se verra ce sera parce que j’ai joué Superman ou Spiderman, quelque chose de positif (rires). Je reçois des auditions pour des trucs plus sérieux qu’on ne me proposerait pas sans Traque à Boston donc ça bouge c’est bien. Rien n’est encore signé mais il y a plusieurs choses en développement. Je veux que ça soit quelque chose aussi gros que Traque à Boston. Mais pour l’instant, je rencontre surtout des gens, je passe des auditions, ce qui est aussi important.
Merci beaucoup.
Merci à toi et tes super questions.