Werk ohne autor
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Werk ohne autor

par Thibault van de Werve
Publié: Dernière mise à jour le

Equipe: Florian Henckel von Donnersmarck, Paula Beer, Sebastian Koch, Tom Schilling
Durée : 188’
Genre: Thriller
Date de sortie: 12/12/2018

Cotation:

4 sur 6 étoiles

Si vous avez manqué le début:

La trajectoire d'un artiste vivant sous le régime nazi puis sous le gouvernement communiste en Allemagne de l'Est...

 

Notre critique:

Après son fulgurant DAS LEBEN DER ANDEREN (La vie des autres) et son raté THE TOURIST, voici que Florian Henkel Von Donnersmark revient avec, WERK OHNE AUTOR, une fresque artistique, une histoire d’amour sur fond de Seconde Guerre mondiale et guerre froide.

Nous sommes en 1937, le pouvoir d’Hitler augmente en permanence et son impact est déjà énorme, notamment en ce qui concerne l’art. Dans un musée de Dresden, le guide déblatère déjà bien la pensée nationale-socialiste et sa vision de l’art. Autant dire qu’elle n’a pas grand chose à voir avec celle d’aujourd’hui et montrait déjà les prémices d’autoritarisme, près de 2 ans avant la guerre. Le jeune Kurt est pourtant admiratif des œuvres qu’il découvre, surtout celles qui ne cadrent pas avec la ligne du parti nazi. Il en est de même pour sa tante Elizabeth. Un beau jour, cette dernière sera emmenée dans un asile et sera une victime de la politique menée par Burghart Kroll qui veut que toute personne pouvant être un poids pour la société soit éliminée. A Dresden, c’est le docteur Seeband qui est en charge de l’hôpital et doit donc mettre en œuvre cette politique.

Adolescent, le jeune Kurt va entrer dans une école d’art où il y rencontrera Ellie. Rapidement, les deux vont se fréquenter et tomber amoureux. A partir de là va démarrer une histoire d’amour qui sera confrontée à de nombreux obstacles et difficultés, liés au passé comme au présent. La façon avec laquelle est illustrée cette romance tend vers le mélodrame mais reste sur sa ligne tout en frôlant la limite en permanence. Cependant, la romance, bien qu’elle existe en tant que romance, sert aussi de contexte pour aborder d’autres sujets. Elle sert d’appui pour parler d’art, de devoir de mémoire, de pardon. Elle a lieu dans le contexte difficile de l’après-guerre et de la guerre froide, de la traque des anciens nazis, du pouvoir géré par l’Union Soviétique. Ce contexte historique a une importance capitale puisque, sans surprise, Kurt croisera la route du docteur Seeband dans sa vie de jeune adulte.

Florian Henkel Von Donnersmark utilise ces relations, tant celle entre Kurt et Ellie que celle entre Kurt et le docteur Seeband, de façon astucieuse puisqu’il parvient à les emmener parfois là où on ne les attend pas. Les confrontations sont multiples, principalement entre les pensées de l’Est et de l’Ouest. Cela concerne l’art bien entendu mais pas seulement. La première partie du film se concentre surtout sur la construction du couple, le spectre de la guerre et l’indépendance tandis que la seconde s’intéresse beaucoup plus à l’affirmation de soi, l’identité et ce via l’art.

Henkel Von Donnersmark s’amuse avec sa mise en scène en filmant diverses performances artistiques de façon astucieuse et créative. Il a de nombreuses idées plutôt réussies et c’est clairement dans les moments créatifs qu’il s’en sort le mieux, le reste du film étant filmé de manière plus classique, sans artifices. On n’est pas loin du téléfilm, c’est probablement la critique que recevra le plus le film. Mais est-ce gênant qu’un long-métrage d’un peu plus de trois heures aient une histoire somme toute très banale et soit si étirée ? Non. Les trois heures passent a une vitesse rapide notamment grâce aux comédiens.

Kurt est incarné par Tom Schilling, comédien aperçu dans SUITE FRANÇAISE et surtout OH BOY. Il a un regard bleu perçant, complètement hallucinant et hypnotique. Cela confère beaucoup de charisme au personnage que l’on suit avec envie et facilité. Le rôle d’Ellie est interprété par Paula Beer, la révélation du FRANTZ de François Ozon tandis que celui du docteur Seeband est interprété par l’excellent et trop rare Sebastian Koch.

WERK OHNE AUTOR, « une œuvre sans auteur » en français, raconte une belle histoire, menée par une romance. Florian Henkel Von Donnersmark a su doser les nombreux ingrédients pour en faire une œuvre digeste agréable à suivre. Il y a certes quelques facilités scénaristiques (mais aussi quelques prises de risques payantes) et le ton peut être très léger mais cela fonctionne alors que c’était loin d’être gagné. Peut-être aurait-ce été mieux d’en faire une mini-série en six épisodes afin d’encore plus développer certains aspects et personnages mais le réalisateur allemand a tout de même réussi son coup.

 

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