Grosse journée en perspective puisqu’elle fait partie de mes quelques journées à 5 films. La question que l’on me pose le plus souvent est: mais comment fais-tu pour voir 5 films dans la même journée? Ma réponse est toujours la même: j’aime les films et le cinéma. Je suis fasciné par ce que les films me racontent et par eux, j’appréhende de nouvelles connaissances sur la société, le monde et les humains. Le cinéma reste un des miroirs (déformant et en raccourcis) de notre réalité comme la littérature, la bande dessinée et l’art en général.
Cela étant dit 5 films en un jour reste une grosse journée cinéma particulièrement quand on en est à 7 jours de festival. Même si une certaine forme d’habitude se fait au cours du temps, on ne peut pas dire que rester 10h (minimum) sur 24h assis dans une salle noire soit le meilleur pour la santé…
Pour le reste, vous qui avez lu les billets précédents, vous connaissez le topo du début de la journée: ablutions, marche, vaporetto (file), petit déjeuner et… cinéma. Les autres, revenez sur la page d’accueil. 😉
C’est dans la sala Darsena que nous commençons la journée (on ne change pas les habitudes) à 8h30 avec un film italien, ENEA. Deuxième film derrière la caméra de Pietro Castellitto qui aborde à nouveau -à l’instar de son précédent film I PREDATORI- les hauts et les bas d’une famille bourgeoise dont le fils Enea (le rapport avec Enée, personnage de la mythologie, est voulu bien sûr) veille au bon fonctionnement, en clair à la bonne rentabilité du clan.
Pour ce faire, lui et son ami d’enfance Valentino trempent dans des affaires louches, des affaires de drogues principalement. La mise en scène se veut dynamique et plutôt inventive mais la narration laisse à désirer avec des raccourcis parfois brutaux et des mélanges de lieux et de temps qui ne facilitent pas la lecture. A trop vouloir faire de l’image, on brûle parfois son récit. Donc ENEA n’est pas un mauvais film mais gagnerait en lisibilité.

Sortir d’une salle, rentrer dans la même quelques minutes plus tard. C’est toute l’histoire des festivals! Retour en sala Darsena à 11h pour voir ZIELONA GRANICA (GREEN BORDER) de Agnieszka Holland pour se prendre une bonne claque dans la figure sur la gestion des réfugiés aux frontières de l’Europe. Agnieszka Holland, en 1990, avait déjà fait la une de nombreux festivals avec son EUROPA EUROPA qui se situait dans l’Allemagne nazie.
Avec GREEN BORDER, plus de 30 ans après, elle cale son projecteur sur la frontière Pologne – Biélorussie, endroit où défilent de nombreux réfugiés en provenance de nombreux pays (Syrie, Afghanistan, Maghreb, Afrique centrale, etc) et où les 2 pays se font une petite « guéguerre » sur le dos de ceux-ci les renvoyant d’un côté et puis de l’autre en les maltraitant (Note: c’est un euphémisme évidemment) à chaque passage.
Film choc, GREEN BORDER n’épargne pas le spectateur montrant toutes les facettes de l’horreur autour de cette migration: le conflit politique entre Biélorussie et Pologne, l’absence de décisions de l’Europe et l’impossible action des ONG et des activistes. Et même si une scène vers la fin semble tomber à côté du sujet, le film est un gros choc et pourrait bien avoir un prix au final. A suivre le 9 septembre…
Sortie vers 13h30 et triple galop vers sala Giardino pour voir DAY OF THE FIGHT, premier film de Jack Huston (petit fils de John pour les cinéphiles) derrière la caméra. Le film raconte la journée de Mickey, boxeur pro, avant son premier combat depuis sa sortie de prison suite à un homicide involontaire au volant de sa voiture. Film en noir & blanc -on devrait d’ailleurs discuter du grand retour du N&B vu à Venise cette année-, DAY OF THE FIGHT n’est pas un énième ROCKY, ni un second RAGING BULL. C’est plutôt un film intimiste qui va se pencher sur la vie d’un boxeur pro qui a raté pas mal de choses et qui souhaite en une journée régler toutes ses casseroles.
John Magaro et Ron Perlman font de belles compositions pour le film et portent beaucoup de la réussite du film sur leurs épaules.
Il est 15h30 quand je sors, juste le temps de prendre une salade de saumon, une salade de fruit et de plancher sur ma 6e chronique pour le Festival.
La journée est loin d’être finie puisqu’il me reste encore 2 films (français) sur le feu: VIVANTS et EN ATTENDANT LA NUIT.
Vers 19h00, je clôture mon billet et vais rejoindre mes collègues et consoeurs autour d’une pizza sympathiquement partagée par une de mes collègues journalistes. On convient que je lui revaudrai ça en apérol spritz, LA boisson du Festival de Venise.
C’est à 19h45 que je me décide à aller vers la salle Darsena pour voir VIVANTS d’Alix Delaporte (ANGELE ET TONY). Immersion dans une équipe de journalistes de terrains et d’investigations (on pense à Envoyé Spécial), VIVANTS suit une stagiaire (Alice Isaaz) dans son parcours du combattant dans cette équipe hors du commun. Beaucoup de sujets abordés mais peu en profondeur. Dommage car il y avait quand même Roschdy Zem, Vincent Elbaz, Pascal Arbillot.

Sortie calme (la fatigue est là) avec une rencontre et un échange sympa autour d’un verre avec le directeur du Ram Dam Festival à Tournai et l’ex-président de l’UCC (Union de la Critique Cinématographique).
Ce qui amène en douceur le film suivant, EN ATTENDANT LA NUIT, qui est en sala Pasinetti à 22h. le film est le deuxième long métrage de la réalisatrice Céline Rouzet et fait partie de ces films originaux qui parlent des vampires d’une autre façon que la voix toute tracé des Bela Lugosi et autres Christopher Lee de la grande époque. On suit la famille Feral qui vient de déménager à la campagne dans un coin calme et sympa qui leur permettra de couler des jours heureux avec leur petite fille et leur adolescent Philémon. Il faut dire que Philémon semble avoir un problème avec le soleil et doit subir des transfusions assez souvent pour se sentir bien.

Vous l’aurez compris, tout ne vas pas se passer comme prévu et les choses vont déraper dans ce fantastique quotidien pour se terminer plutôt tragiquement. Le traitement est original et le choix d’avoir un vampire « normal » fait bien évidemment penser à MARTIN de George Romero.
C’est à 23h50 que je pars prendre le vaporetto qui me ramènera dans mon lit aux alentours de 1h du matin pour profiter d’une « bonne nuit de sommeil » avant mon réveil à 6h.
Et la lune se reflète sur la lagune comme tous les soirs à Venise.