Equipe: Abdellatif Kechiche, Alexia Chardard, Ghalia Lacroix, Hafsia Herzi, Lou Luttiau, Ophélie Bau, Salim Kechiouche, Shaïn Boumedine
Durée : 218’
Genre: Drame
Date de sortie: 31/12/2019
Cotation:
Si vous avez manqué le début:
Septembre 1994. Sur la plage de Sète, Ophélie et ses amies se baignent et s’amusent ensemble. Un peu plus loin, seule, Marie lit un essai “Le tonneau de Diogène” avant de se faire accoster par Tony et Kamel qui la draguent lourdement et lui demande de venir s’installer sur la plage avec le reste de la bande...
Notre critique:
Et voilà, il aura fallu attendre l’avant dernier jour du Festival de Cannes 2019 pour avoir enfin une controverse digne de ce nom dans un Festival somme toute très consensuel cette année. Et la controverse arrive là où l’on pouvait s’y attendre: avec le film d’ Abdellatif Kechiche, MEKTOUB MY LOVE: INTERMEZZO, deuxième opus de la trilogie prévue, après MEKTOUB MY LOVE: CANTO UNO.
Intermezzo, c’est un intermède en italien. Et ce film est donc l’entracte entre le premier opus et le dernier qui devrait suivre dans la filmo de Kechiche. Comme tel, on ne s’attendait forcément pas à quelque chose d’autre qu’un entre deux, probablement léger comme l’était MEKTOUB MY LOVE: CANTO UNO.
Mais Abdellatif Kechiche surprend tout le monde en utilisant ce film comme une vitrine expérimentale qui lui permet de pousser jusqu’au bout sa volonté de s’abstraire des schémas standards du cinéma, de prendre encore plus de liberté avec les codes du 7e art et de prouver sa maestria de l’image.
Cependant en déconstruisant complètement sa narration au profit d’une image redondante, répétitive à l’extrême, réduisant les dialogues à des poncifs inutiles proches de la psychologie de comptoir, Kechiche tire la corde trop loin et se met lui même en dehors de l’essence même de ce qu’est un film.
Et contrairement à un Gaspar Noé qui, en faisant la même démarche, propose malgré tout de nous entraîner sur une réflexion artistique, Abdellatif Kechiche atteint sans doute son but provocant mais ne délivre plus rien si ce n’est un message creux ou au mieux une sorte d’happening de 3h38. En tentant de célébrer le désir de la façon la plus libre possible, il tue ce qu’il veut mettre en avant et rend son expérience inutilisable en tant que tel.
Avec ses 45 minutes de scènes de plage dès le commencement pour placer le début du désir, ses 1h45 de danses sexualisées dans une boîte de nuit où la caméra de Kechiche ne s’attarde que sur les mouvements des corps, avant de passer au climax de son film, une scène de cunnilingus non simulée de près de 15 minutes dans les toilettes de la boîte de nuit pour finir par 45 minutes de boite de nuit à nouveau, MEKTOUB MY LOVE: INTERMEZZO finit par amener le dégoût de ces corps (beaux par ailleurs) pour le spectateur.
Si l’on ne peut qu’être admiratif des comédiens et des comédiennes du film qui se donnent à fond physiquement et artistiquement, il est hélas impossible de souscrire au message d’ Abdellatif Kechiche qui prétend faire de l’impressionnisme, voire du cubisme et de célébrer la beauté du désir et des corps alors qu’il entraîne le spectateur sur la voie de la détestation.