Equipe: Alexis Manenti, Damien Bonnard, Djibril Zonga, Giordano Gederlini, Jeanne Balibar, Ladj Ly, Steve Tientcheu
Durée : 102’
Genre:
Date de sortie: 20/11/2019
Cotation:
Si vous avez manqué le début:
1998. Les français ont gagné la coupe du monde de football. Paris est en liesse. Mais cette communion entre “tous” les français n’est jamais que temporaire. Et quand Stéphane Ruiz débarque en direct de Cherbourg pour intégrer la Brigade Anti-Criminalité (la BAC) de Montfermeil dans le 93, il va très vite se rendre compte qu’avec ses nouveaux coéquipiers Chris et Gwada, la banlieue ne va pas être de tout repos.
Notre critique:
LES MISERABLES part sur une liesse qui se transforme rapidement en cauchemar. Et, en collant à la réalité comme un documentaire, c’est bien ce qu’à voulu démontrer le réalisateur Ladj Ly. A l’origine, court-métrage primé de nombreuses fois, LES MISERABLES était un cri d’alarme. Une alerte retentissante sur ce qui se passait et qui se passe encore en banlieue. Pour Ladj Ly, né dans cette banlieue, qui, devenu adulte, s’est mis à filmer les interventions policières à Montfermeil jusqu’au jour où il a filmé une bavure, il est plus que temps de pousser un cri vers le pouvoir pour lui faire ouvrir enfin les yeux.
Et c’est clairement ce qu’est LES MISERABLES version long métrage: une mise en garde contre l’abandon total des banlieues par les organismes culturels, par l’éducation nationale ou encore par l’autorité locale.
LES MISERABLES a l’intelligence de jouer sur les thématiques que l’on retrouve usuellement dans ce type de films entre policier et social: le bleu qui débarque dans une brigade, les anciens entre ripoux et ceux à qui on ne la fait plus, les trafics en tout genre et les personnages borderline dans les deux camps. Ladj Ly et ses co-scénaristes s’emparent de ces presque-clichés pour s’en servir dans la création d’antagonismes forts au service d’une histoire à plusieurs niveaux.
Mais le plus remarquable dans le film de Ladj Ly, c’est cette capacité à immerger le spectateur au centre des banlieues, à nous faire participer à cette tension palpable en étant en permanence sur le fil du rasoir entre la dérision -les dialogues sont souvent très drôles et jouent sur la provocation constante entre les flics et les banlieusards- et la violence. Il nous montre que rien n’est simple dans les cités, des communautés diverses (musulmans, gypsies, le maire, la police) sont en lutte d’influence permanente et cela ressemble plus à une bombe à retardement qu’à une simple zone de non-droit.
Les personnages sont eux aussi très soignés. On sent clairement l’implication de ces acteurs, souvent issus des banlieues aussi (comme le réalisateur), qui ont travaillé leurs rôles respectifs pour parvenir à leur donner corps et âmes. Qu’ils soient impliqués dans le scénario (comme Chris – Alexis Manenti) ou dans la vie de leur banlieue, ils apportent une force incroyable au réalisme de la description.
Et Ladj Ly ne s’arrête pas à faire juste un film réaliste, il utilise parfaitement la fiction, notamment lors du retournement final, pour dérouler sa narration au cordeau tout en faisant passer son message. La phrase finale de Victor Hugo extraite des Misérables, mise en exergue avant le générique, clôture très bien le propos: “il n’y a ni mauvais hommes, ni mauvaises herbes, il n’y a que de mauvais cultivateurs”. Tout est dit!